BRUXELLES, 25 juillet 2011 (AFP) – L’office antifraude européen (Olaf) a indiqué lundi avoir ouvert une enquête sur d’éventuels conflits d’intérêts au sein de l’Agence européenne du Médicament (EMA) dans l’affaire du Mediator, médicament accusé d’avoir causé la mort de centaines de patients.
« Une enquête a été ouverte le 22 juillet » à ce propos, a indiqué son porte-parole Pavel Borkovec à l’AFP.
Dans un courriel adressé à la députée européenne écologiste Michèle Rivasi, dont l’AFP a obtenu copie, l’Olaf précise que cette enquête a pour but « de vérifier les allégations de conflit d’intérêts » à la suite d’informations transmises par la députée concernant des irrégularités potentielles à l’Agence européenne du médicament.
Cette enquête peut déboucher sur un classement sans suite, un recouvrement financier, une saisine des autorités disciplinaires de l’EMA ou un renvoi du dossier aux autorités judiciaires nationales, a précisé l’Olaf dans sa notification.
« C’est une première victoire qui va permettre de donner un coup de pied dans la fourmilière de l’EMA », s’est réjouie Mme Rivasi.
L’enquête se fera « en collaboration avec les autorités judiciaires françaises », a-t-elle précisé.
Ces dernières avaient mené début juin des perquisitions en France dans le groupe pharmaceutique français Servier, dans le cadre de l’enquête sur l’affaire du Mediator (Benfluorex).
En France, deux informations judiciaires contre X pour « tromperie aggravée » et pour « homicides et blessures involontaires » ont été ouvertes dans cette affaire, et un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) avait mis en lumière en janvier le rôle de plusieurs experts français, qui siégeaient également à l’EMA, dans l’interdiction tardive du médicament.
Destiné aux diabétiques en surpoids mais largement détourné comme coupe-faim, le Mediator a fait en France en 33 ans entre 500 et 2.000 morts, selon plusieurs études.
Le Médiator n’a été retiré du marché français qu’en novembre 2009 en raison des risques cardiaques encourus par les patients. Mais il avait déjà été retiré du marché en Espagne en 2003, en Italie en 2004 et dès 1979 en Suisse.
L’EMA se défend en soulignant qu’elle n’avait alors « aucun mandat » pour se prononcer sur des procédures d’autorisation nationales du Médiator. Et souligne qu’elle a réformé ses règles internes en matière de conflits d’intérêts.
En mai, le Parlement européen avait refusé de donner son quitus au budget de l’EMA en refusant de voter sa décharge budgétaire, lui donnant six mois pour se réformer.
Mme Rivasi s’est par ailleurs réjouie d’une décision de l’EMA du 21 juillet de déconseiller les injections de Pandemrix, le vaccin anti H1N1 produit par GSK, chez les moins de 20 ans en raison du risque de narcolepsie associée à ce vaccin.
Selon l’eurodéputée, qui a demandé et obtenu fin juin l’accès aux compte-rendus des discussions de l’EMA sur le Pandemrix, « la première alerte remonte à août 2010 » et des études finlandaises, suédoises puis françaises sont venues confirmer en janvier 2011 l’existence de ce risque.
En mai 2011, les représentants de 7 Etats européens s’étaient exprimés au sein de l’EMA en faveur d’une restriction de l’emploi du Pandemrix chez les moins de 20 ans, mais cet avis n’a été suivi que la semaine dernière, a relevé la députée.
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