Les élections sont un moyen avant d’être une fin : aux urnes citoyens arméniens !

Alors que la France vit une période électorale trépidante, qui mènera sûrement à une alternance attendue depuis longtemps…d’autres élections bien loin d’ici revêtiront un caractère tout aussi important. En effet, le 6 mai alors qu’aura lieu le deuxième tour des élections présidentielles françaises, les Arméniens se rendront dans leurs bureaux de vote pour élire une nouvelle assemblée.

La jeune démocratie arménienne a encore beaucoup de preuves à faire et tous les observateurs – arménophiles ou non – s’accordent à dire que ces élections n’auront pas seulement pour but d’élire des députés au Parlement. Non, il y a bien plus à espérer car l’avenir du pays, tout comme son intégrité, sont en jeu.

Dans le fond comme dans la forme, ces élections reflèteront la position que l’Arménie souhaitera adopter tant dans ses affaires intérieures qu’à l’international. C’est pourquoi l’organisation de ce scrutin doit être irréprochable, afin de faire taire les mauvaises langues qui fustigent le manque de démocratie et la corruption en Arménie.

Les progrès accomplis ces dernières années sont remarqués et remarquables, ils ne doivent pour autant être une simple façade du changement en cours dans la société arménienne. La crise politique de mars 2008 reste dans les mémoires de tout un chacun. En suivant les recommandations européennes, la pays a montré une responsabilité qui peut et doit faire pâlir ses voisins de honte. Amnisties, dialogue avec l’opposition extra-parlementaire, modification du code électoral, liberté de réunion sont autant de progrès qui seront gravés dans le marbre à l’issue des prochaines élections.

Ces changements honorent l’Arménie et sa diaspora. Ils sont une double-récompense pour le peuple puisqu’ils aboutiront aussi à l’établissement d’un partenariat durable avec l’Union européenne. Preuves en sont la progression rapide des négociations en vue d’un accord de partenariat UE-Arménie, la future facilitation de l’attribution des visas mais aussi l’émergence d’un véritable accord de libre-échange. A terme, l’Arménie rejoindrait la Suisse, l’Islande et la Norvège dans le club prestigieux des pays démocratiques faisant partie de l’association européenne de libre-échange (AELE). Voilà pour les aspects économiques, fondamentaux même si ils ne sont que la partie d’un ensemble qui demande toujours plus de cohérence et de sérieux. Ces enjeux sont d’autant plus importants en période de crise car il est impératif de lutter contre l’isolement économique du pays.

La politique étrangère de l’Arménie elle aussi démontre la maturité acquise au gré d’évènements tragiques. Les menaces de guerre avec l’Azerbaïdjan restent bien heureusement lettre morte dans les échanges de télégrammes diplomatiques. Les tensions constantes du conflit au Nagorno-Karabakh, où je me suis rendu en tant qu’observatrice en 2010, font grincer les dents du groupe de Minsk en charge de sa résolution. Pour autant ce conflit larvé peut et doit être résolu de manière pacifique, la France comme l’UE s’y emploieront. N’oublions pas que la guerre est synonyme de perte même lorsqu’elle mène à la victoire. L’Arménie a déjà assez souffert et les générations futures méritent un avenir apaisé sans quoi la haine et la rancœur seront leur seul horizon. Aussi, et malheureusement, les relations avec la Turquie ne s’améliorent pas vraiment, mais l’Arménie a fortement gagné en crédibilité en faisant les premiers pas : la balle est dorénavant dans le camp turc. C’est au regard de ces avancées que je tiens à rappeler une vérité aussi banale qu’importante: l’Union européenne favorisera toujours les pays qui justifient la confiance qu’elle leur a accordée.

Vous l’avez compris, les défis sont nombreux. Et pour les dépasser avec succès, il faut élire ceux qui penseront à l’avenir du pays entier plutôt qu’à leur propre situation et à celle de leur famille, ceux qui auront les compétences nécessaires. Je ne fais pas de procès d’intention, je ne fais pas la morale : ces critiques je les adresse à l’ensemble des pays démocratiques, la France comprise. En tout cas, ceux qui ne voteront pas ou voteront mal n’auront plus d’excuses lorsqu’ils se lamenteront du délabrement de leur pays et de la corruption de leurs élites. Les bénéfices du vote n’existeront que s’ils sanctionnent les irresponsables et donnent leurs chances aux braves : seuls de bons élus parviendront à renforcer l’Arménie dans ses convictions démocratiques.

Avec un peu de chance et beaucoup de diplomatie, la contagion s’étendra aux pays voisins et démontrera que la fatalité n’est ni cocasse, ni caucasienne. Cette chance aussi infime soit-elle, les Arméniens l’auront entre leurs mains : c’est leur bulletin de vote.

[facebook_ilike]

Articles similaires :

Par Michèle Rivasi

Suivez-moi sur Facebook

Suivez-moi sur Twitter