Cinq garanties pour déconfiner sereinement

Alors que la moitié de la population mondiale est invitée à rester chez elle, plusieurs pays européens précisent quand et comment le déconfinement pourra être mis en œuvre dans les meilleures conditions. La France a annoncé une première date et ses mesures de déconfinement pour le lundi 11 mai 2020. A cette date, pour envisager une sortie réussie du déconfinement, cinq conditions devraient être réunies.

Tout d’abord, il nous faut plus de connaissances sur le degré d’exposition de la population au virus. Les chiffres actuels de prévalence de l’épidémie ne nous permettent pas en France d’avoir une vision exacte de la propagation du virus, puisque seuls les porteurs de symptômes graves sont dépistés dans la population générale, soignants exceptés. D’une part, il nous faut savoir quelle part de la population est contaminée, information que l’on peut obtenir avec le test de diagnostic moléculaire dit PCR. Nous ne pouvons pas nous contenter de tests faits à la demande, aux seuls personnes présumées malades ou en situation de fragilité. De la même façon que sont fait les sondages d’opinion, ces tests devraient se faire sous forme d’échantillonnage dans différentes régions, permettant de donner un ordre d’idée sur le nombre de personnes susceptibles de transmettre le virus. D’autres part, les tests sérologiques avec prélèvement sanguin indiqueront quant à eux le niveau d’immunité, c’est-à-dire le nombre de personnes qui ont été au contact du virus, ont fabriqué des anticorps et en seraient immunisées. Cette information permettra des stratégies de déconfinement adaptées en évaluant les niveaux d’immunisation selon les régions.

Deuxièmement, il semble que nous sommes actuellement loin du seuil d’immunité de groupe, le pourcentage d’individus immunisés au-delà duquel la maladie s’éteint. Dans ces conditions, la généralisation du dépistage au sein de la population permettra cependant de maintenir les personnes porteuses du virus en confinement le temps qu’elles soient guéries, tout en permettant aux autres de reprendre une vie plus normale. Laboratoires de villes et laboratoires vétérinaires pourraient être les lieux de pratique de ces tests, pour éviter un engorgement brutal des hôpitaux ou des cabinets médicaux. Par ailleurs, comme cela été annoncé hier soir, les populations fragiles (diabètes, hypertensions, âge avancé, etc.) devront rester protégées des expositions au virus. 

Troisièmement, le déconfinement nécessite que, outre le maintien des pratiques de distanciation sociale, des masques soient disponibles pour l’ensemble de la population. En France, il existe encore des outils de production à mobiliser, voire à réquisitionner. La stratégie qui consiste à dépendre d’une source unique d’approvisionnement, pour les masques comme pour les principes actifs pharmaceutiques, a montré ses limites et sa dangerosité. 

La quatrième garantie nécessaire au déconfinement est le retour à un système de santé où les services de réanimation et les structures sanitaires ne sont plus saturés et sont capables d’apporter les soins adaptés. Ceci signifie débloquer des aides d’urgence afin de soutenir les soignants, mais aussi lancer un plan national de remise en état des moyens de prises en charge en France (états des infrastructures, besoins en personnels, nombre de lits, etc.). Par ailleurs, plusieurs traitements sont en cours d’exploration et de validation scientifique. Dès que les résultats seront connus, ils devront pouvoir être utilisés en masse pour éviter les cas graves d’évolution de la maladie ; alors la libération des lits en services de réanimation et le désengorgement global des hôpitaux en cette période de crise seront possibles.

Enfin, la disponibilité des médicaments nécessaires doit être assurée : antibiotiques, curare, morphine et autres substances nécessaires à la réanimation, puis nouveaux traitements lorsqu’ils seront identifiés. L’épidémie a révélé une très préoccupante pénurie de médicaments dans certains pays comme la France qu’il faut résorber. Ce problème peut être résolue en créant un organisme public-privé au niveau de l’Europe pour fabriquer les principes actifs des médicaments indispensables à de nombreux médicaments essentiels, organiser la production et en mutualiser les stocks en Europe. Par ailleurs, ces outils de santé essentiels ne peuvent être contrôlés par des firmes, que ce soit au travers de brevets ou d’autres formes de monopoles.

Ces 5 garanties sont indispensables pour envisager un déconfinement en évitant une récidive générale.

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Par Michèle Rivasi

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