Le paquet Pharma est paru aujourd’hui, mercredi 26 avril 2023. Le texte, plusieurs centaines de pages et d’articles, contient des avancées indéniables, mais inclut aussi des dispositifs très favorables à l’industrie. Mon analyse :
« Garantir l’accès à des médicaments abordables, favoriser l’innovation, améliorer la sécurité de l’approvisionnement, s’adapter aux nouveaux développements scientifiques et technologiques, et réduire les formalités administratives »… Tels sont les piliers annoncés ! Mais l’industrie pharma est un poids lourd de l’économie en Europe. Soyons lucides, ce texte veille d’abord à « ne pas nuire »… aux labos !
On continue ainsi de vouloir stimuler et encourager l’innovation avec des incitations « à la carte », des exemptions attribuées selon les engagements des entreprises, et une simplification des procédures d’autorisation ou d’examen. « Non, on ne touche pas au système de propriété intellectuelle », a confirmé Stella Kyriakides, la commissaire européenne pour la santé. Les monopoles des brevets, tant critiqués dans le cadre de Covax, sont donc renforcés avec ce système « à la carte ».
Pour pallier à la pénurie des médicaments, la Commission propose en particulier d’établir une liste de médicaments critiques à l’échelle de l’UE. Enfin ! Cela fait des années que les ONG et les acteurs victimes de tension d’approvisionnement demandent cette harmonisation.
Le renforcement de l’obligation en matière d’étude d’impact environnemental est à mes yeux l’un des grands progrès de la proposition de la Commission. Des autorisations d’ailleurs pourront être refusées pour ce motif.
La lutte contre la résistance antibactérienne devient le prétexte à un « bonus » de durée de brevets. Je salue en revanche une première inclusion des phages dans le texte, bien que tout reste à définir.
La pharmacovigilance européenne me parait être enfin la grande oubliée de ce texte. Comme si le système de suivi d’un médicament une fois commercialisé ne présentait pas de nombreuses carences qu’il serait tant de pallier. Cette proposition, annoncée depuis 2020 et publiée plus de 20ans après la directive de 2001 sur les médicaments à usage humain, reste donc au service de l’industrie, au nom de l’intérêt des patients. Cela me dérange !
Bref, ce texte, sous couvert d’aborder des questions urgentes, comme celle de la pénurie des médicaments, de la pollution pharmaceutique ou de l’antibiorésistance, promeut un schéma qui laisse en réalité le pouvoir au bon vouloir de l’industrie.
Je ne crois pas à la « conditionnalité » mise en avant par la Commission. Il y a trop de trous dans la raquette. Ce n’est pas les brevets qui protègent les patients, c’est la législation. Simplifier et accélérer les procédures d’autorisation va augmenter le risque de scandale sanitaire.