Le principe de précaution doit rester constitutionnel

Une proposition de loi visant à ôter au principe de précaution sa portée constitutionnelle a été déposée le 10 juillet dernier par des députés de l’opposition, dont d’anciens ministres comme Eric Woerth, François Fillon et Benoît Apparu.

Pour Michèle Rivasi, députée européenne EELV, s’attaquer à un principe de cette importance pourrait mettre en péril la sécurité de nombreux citoyens : « la proposition de loi déposée assimile le principe de précaution à un frein à la croissance économique qui, dans notre système actuel, se nourrit d’innovation, à n’importe quel prix et parfois au détriment du consommateur. Or, faut-il rappeler la définition de ce principe (1) et son utilité, véritable garde fou destiné à protéger les citoyens des scandales sanitaires à venir? Pourquoi ces députés attaquent-ils aujourd’hui la constitutionnalisation du principe de précaution alors accepté sous l’ère de Nicolas Sarkozy, ont-ils perdu la mémoire?
Aujourd’hui je regrette que ce principe ne soit pas véritablement appliqué, puisque des technologies majeures comme la téléphonie mobile, les nanomatériaux, les produits chimiques contenant des perturbateurs endocriniens (2) ou les OGM sont développées sans évaluation sérieuse préalable du danger pour la santé et les écosystèmes et aucune mesure n’est prise par la suite pour évaluer les conséquences de leur mise en œuvre. La santé du citoyen et du consommateur n’a que trop fait figure de variable d’ajustement face à des intérêts « supérieurs  » pour développer au plus vite un produit ou une technologie, il est temps que cela cesse.

Les écologistes ne s’opposent pas aveuglément à toute innovation. Bien au contraire, nous militons pour une innovation réellement concertée, une innovation démocratiquement débattue et choisie par la société dans son ensemble et pas seulement par quelques intérêts privés influents qui décident pour tous les autres. Alors pourquoi un tel acharnement contre ce principe protecteur? Ne voit-on pas derrière les attaques à ce principe se profiler le puissant lobby de l’industrie chimique et agroalimentaire qui a tout intérêt à ce que leurs produits disparaissent du marché en raison du potentiel danger des produits chimiques?

Posons-nous les bonnes questions, avons-vous réellement et collectivement besoin de certaines technologies dont nous ignorons les risques à long terme ? Prenons le temps d’évaluer les bénéfices-risques des usages choisis, pour notre santé et celle des générations futures ».

(1)Principe selon lequel l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque dans les domaines de l’environnement, de la santé ou de l’alimentation.
(2) Sont en particulier directement concernés le marché des pesticides, des emballages alimentaires, des médicaments et des cosmétiques. Dans son audition du 18 juillet 2013, l’expert Andreas Kortenkamp s’est exprimé sur la question des perturbateurs endocriniens et a rappelé qu’il existe aujourd’hui un consensus scientifique sur les effets néfastes des perturbateurs endocriniens sur la santé. Le principe de prévention a donc tout intérêt à s’appliquer dans ce domaine.

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Par Michèle Rivasi

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