L’e-cigarette en vente libre: «avec des restrictions, des contrôles» (Libération)

8 OCTOBRE 2013 À 10:41

TCHAT Le Parlement européen a décidé ce mardi que la cigarette électronique ne sera pas vendue en pharmacies. Michèle Rivasi, eurodéputée EE-LV, partisane d’un encadrement plus strict à répondu à vos questions.

Jean B. Le marché de la vente de cigarettes électroniques est très porteur dans toute l’Union européenne. Dans cette période de marasme économique, le Parlement a-t-il tenu compte de cet aspect? qu’en pensez-vous?

Michèle Rivasi. Le Parlement européen a voté en faveur du marché, puisqu’il n’y a pas d’autorisation de mise sur le marché allégé, tel que la Commission et les Verts le demandaient. Cela veut dire, que l’on ne fait confiance qu’aux marchés, qu’à l’économique, et qu’on n’a pas pris les précautions sur l’aspect sanitaire. Le contrôle se fera en aval, et pas en amont.

Parfait. Le Parlement a exclu la vente de l’e-cigarette en pharmacie? qu’en pensez-vous?

Michèle Rivasi. Je trouve que c’est une erreur, dans la mesure où la vente en pharmacies demandait à ce qu’il y ait des études en amont.

Raphaël. Je fumais 30 cigarettes / jour. J’en suis à 3 et je vapote. Ma santé va mieux… N’est-ce pas tout simplement une histoire de gros sous ?
Mibion. Ceci est un simple témoignage portant sur plusieurs de mes proches, accros au tabac depuis des années, qui ont cessé de fumer en se mettant à l’e-cigarette. Pas un seul retour au tabac depuis 3 mois…

M. R. Je suis d’accord avec vous, la cigarette électronique peut diminuer la consommation et même contribuer à l’arrêt du tabac. La seule chose que l’on demandait c’est qu’il y ait un contrôle plus conséquent sur la fabrication de ces cigarettes électroniques et un contrôle sur le liquide contenant de la nicotine. Les choses ne sont pas incompatibles.

Alice. Sait-on si l’e-cigarette incite les jeunes à fumer? Qu’a prévu le Parlement européen pour limiter le vapotage des plus jeunes?

M. R. On ne pourra pas vendre des cigarettes électroniques au moins de 18 ans. Les fabricants et les importateurs devront soumettre aux autorités compétentes une liste de tous les ingrédients qu’elles contiennent, avec interdiction de publicité. Pour l’instant, il n’y a pas d’étude précise qui indique que des jeunes qui commencent à la cigarette électronique ne vont pas être attirés par le tabac.

Vapoteur. La nocivité de l’e-cigarette est-elle prouvée? des études (fiables) ont-elles été menées?

M. R. Il y a quelques études qui montrent que la cigarette électronique produit des molécules toxiques, mais on n’a pas assez de recul. Pour ma part, je pense que c’est moins toxique que la cigarette, mais ce n’est pas une raison pour ne pas en savoir davantage.

Marius. La Commission européenne a-t-elle prévu de bannir les cigarettes parfumées?

M. R. Il y aura interdiction d’utiliser des saveurs, comme le chocolat, la vanille ou autres. Et le menthol sera interdit seulement au bout de huit ans.

Calamiti. L’e-cigarette pourrait-elle devenir un médicament et son usage contrôlé?

M. R. Une fois que la directive sera votée, en décembre 2013, chaque Etat membre pourra avoir une législation plus restrictive. Et pourquoi pas demander une autorisation de mise sur le marché plus contraignante, telle que cela existe à l’heure actuelle dans treize Etats membres.

Echo. Le rapport commandé par Marisol Touraine indique qu’il n’y a pas de produits cancérogènes dans les cigarettes électroniques. Sur quelle étude se base votre affirmation que les cigarettes électroniques contiennent des produits «toxiques»?

M. R. Il y a eu une étude allemande qui a montré qu’il y avait de l’acroléine, ainsi que des formaldéhyde, il y a une suspicion de produits toxiques, encore faut-il faire des études plus poussées, et de contrôler dans les cocktails proposés – jusqu’à 104 – ce qu’il y a dedans. Que contiennent des produits comme «Cubalibre», vous avez «Mexicanekiss», «Sexeandthebeach», «Pina Colada» qui font penser à des cocktails d’alcool? D’où ma demande de préciser ce qu’il y a exactement dans ces produits avant commercialisation.

Echo. Je suis tout à fait d’accord pour que les eLiquides soient contrôlés strictement. Pourquoi la France ne fait-elle rien dans ce sens?

M. R. Il y a eu une explosion en France de la vente des cigarettes électroniques, sans que les autorités aient eu le temps de contrôler tous les cocktails proposés.

Gabraski. Le Parlement européen et le Conseil ne partagent pas le même avis sur les cigarettes électroniques. Quelles chances y a-t-il de voir le vote d’aujourd’hui renversé pendant les trilogues ? Ce point sera-t-il une cause de blocage qui pourrait empêcher l’adoption de la directive avant la fin du mandat en cours?

M. R. Bonne question. Le pouvoir de négociation qui a été donné au rapporteur doit justement trouver un compromis entre les Etats membres et le Parlement.

Echo. Cela fait plus de 2 ans que les cigarettes électroniques sont commercialisées en France. Et toujours aucun contrôle: qu’attendons-nous?

M. R. La ministre de la Santé attendait la directive européenne.

Bernard. Si la cigarette électronique est si nocive, pourquoi la commission européenne n’envisage pas que le tabac (le vrai, celui qui tue) soit vendu en pharmacie, ou mieux interdit ?

Alex6. le Parlement Néo-Zélandais veut bannir totalement le tabac. Vu les enjeux sanitaire, militeriez-vous en faveur d’une telle disposition ?

M. R. Je ne suis pas pour interdire. Je suis pour la liberté des choix mais avec des restrictions, des contrôles. Notamment de l’industrie du tabac qui rajoute des produits qui augmentent l’addiction au tabac. Mais si on interdit le tabac, il faut interdire l’alcool, on rentre dans une société d’interdiction…

Alize. Pourra-t-on continuer à vapoter dans les cafés? les entreprises?

M. R. La France a décidé d’interdire le vapotage dans les lieux publics. Dans les entreprises, c’est un agrément avec le règlement interieur de l’entreprise, et avec son voisin du bureau!

liliC. Pourquoi voir à toute force interdire ? Nous dirigeons nous vers une Europe totalitaire et liberticide ?

M. R. On veut réglementer, et donner une information éclairée aux consommateurs que vous êtes et que nous sommes tous. Il y a des intérêts divergents entre les producteurs de cigarettes électroniques, qui sont là pour faire du business, et le législateur qui est là pour protéger la santé des citoyens européens.

BSP42. Quand vous dites que «la France a décidé d’interdire le vapotage dans les lieux publics», vous faites référence à quel article de loi ?

M. R. Je fais référence aux déclarations de notre ministre Marisol Touraine. Il faut qu’il y ait une cohérence entre l’utilisation de la cigarette et l’utilisation de la cigarette électronique dans les lieux publics.

Pp. Les tabacologues, pneumologues, cancérologues sont tous d’accord pour préconiser que la cigarette électronique reste facile d’accès, et ni assimilée aux médicaments, ni à un produit assimilé au tabac. Quelle est votre position ?

M. R. Il n’y a que dix médecins qui ont demandé que la cigarette électronique ne soit pas assimilé à un médicament. Et il n’en était pas question puisque l’on voulait faire une AMN (autorisation de mise sur le marché) allégée sans études sur les patients.

Mibion. Pourquoi seule la publication de 60 millions de consommateurs a-t-elle fait l’objet d’une grande médiation alors que dans le même temps, celle de Que Choisir (sept 2013), plutôt favorable à l’e-cigarette, avec test à l’appui, a été totalement passée sous silence ?

M. R. IL n’y a pas que 60 millions de consommateurs, il y a eu aussi une étude allemande qui allait dans le sens de 60 millions et qui était là pour mettre en alerte les utilisateurs de cigarettes électroniques qui pensent qu’il n’y a aucun risque à utiliser la cigarette électronique. Ne dramatisons rien, mais restons vigilants.

L’objectif de cette directive est quand même de diminuer la consommation des jeunes vis-à-vis du tabac, et donc de ne pas en faire un produit attractif, car après consommation on devient «drogué» par la nicotine, et ce n’était pas l’objectif de la cigarette électronique.

Les députés européens ont été soumis à un lobby du tabac incroyable, et à un lobby des producteurs des cigarettes électroniques qui voulaient banaliser à tout prix leur produit sans qu’il y ait une évalusation sanitaire des autorités. Il faut remettre les choses à leur place.

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Par Michèle Rivasi

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