Chaque année, plusieurs dizaines de milliers d’infections liées aux sondes vaginales et rectales contaminées (APM)

PARIS, 3 juin 2013 (APM) – Plusieurs dizaines de milliers de Français seraient exposés à une maladie infectieuse à l’occasion d’une échographie endovaginale ou endorectale en raison d’une procédure de désinfection inefficace, selon une modélisation mathématique citée par la députée européenne Michèle Rivasi (Les Verts), lundi lors d’une conférence de presse.

La modélisation mathématique a été présentée avec deux autres lors des 54èmes journées scientifiques des manipulateurs en radiologie le 23 mai. Ces travaux sont en cours de publication.

Michèle Rivasi s’est entourée de sociétés savantes, de l’association de patients Le Lien et d’un expert du Center for Diseases Control and Prevention (CDC) américain pour dénoncer lundi un niveau de décontamination des sondes échographiques insuffisant en France.

Chaque année, les sondes d’échographies vaginales ou rectales pourraient être à l’origine de 60 infections VIH, 1.620 hépatites B, 230 hépatites C, près de 15.000 Herpès gynécologiques et d’infections par le papillomavirus humain (HPV), 36.000 contaminations par le cytomégalovirus et plus de 4.000 par Chlamydia trachomatis. Ces résultats sont issus d’une projection mathématique réalisée par Sandrine Leroy de l’Institut Pasteur et ses collègues. Ils ont évalué le nombre de patients potentiellement infectés après un examen échographique malgré une désinfection répondant aux recommandations actuellement en vigueur en France.

A la différence des Etats-Unis, du Canada, de l’Allemagne, de l’Espagne, de la Turquie, de l’Australie et de la Suisse, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) recommande en France une procédure de décontamination des sondes échographiques endocavitaires de niveau bas. Les sondes ne sont pas soumises à une désinfection optimale entre chaque examen.

Depuis 2007, le HCSP préconise seulement la pose avec des gants d’une gaine à usage unique avant une désinfection au moyen d’une lingette désinfectante également à usage unique. Les sondes doivent également être stérilisées une fois par jour. « Le Lien avait accepté ces recommandations du HCSP, à condition que soient réalisées des études scientifiques évaluant le niveau de risque de contamination des patients », a expliqué Alain-Michel Ceretti, fondateur du Lien. L’association dénonce une diminution des exigences en matière de sécurité depuis la publication des recommandations du HCSP (cf APM VBLAM004).

UN NIVEAU DE PREUVE DE CONTAMINATION IMPORTANT

« Depuis, des faits convergents montrent qu’il y a un problème », a confirmé le Pr Guy Frija, président de la Société européenne de radiologie et chef de service à l’hôpital européen Georges Pompidou (HEGP, AP-HP). En avril 2012, une étude du centre hospitalier de Laval, présentée en congrès, indiquait que 11% des gaines étaient perforées (dont une grande majorité de perforations non visibles à l’oeil nu). Le mois suivant, des travaux chinois publiés dans Emergency Medicine Journal, suggéraient que 7,5% des sondes vaginales étaient contaminées par HPV, malgré l’utilisation de lingettes désinfectantes et d’un préservatif.

Une étude française publiée dans Plos One en octobre 2012 a renforcé les doutes sur le niveau du risque infectieux lié aux examens d’échographies endocavitaires en France. L’un de ses auteurs, Yahia Mekki, infectiologue au CHU de Bordeaux, a présenté ses résultats à la presse lundi. Il a quantifié le niveau d’exposition aux HPV des sondes dans un service d’urgences gynécologiques des Hospices civils de Lyon (HCL) entre mai et octobre 2011 qui appliquait les recommandations du HCSP. Il a détecté l’ADN humain et d’HPV par PCR (polymerase chain reaction) juste après le passage de la lingette (200), puis juste avant la pose d’une nouvelle gaine (217).

Selon ces résultats, dans les deux cas, le taux d’infection par le HPV était d’environ 3%. Par ailleurs, de l’ADN humain a été retrouvé dans 28% des prélèvements réalisés au moment où le gynécologue allait mettre la gaine et dans 18% des prélèvements effectués juste après le passage de la lingette. La présence d’ADN humain montre qu’au-delà des HPV, cette procédure de désinfection de bas niveau expose les patientes à un risque de contamination infectieuse dans plus d’un cas sur cinq.

UNE ALERTE DE LA SF2H A LA DGS ET LA DGOS SANS REPONSE DEPUIS JANVIER

L’ensemble de ces données ont conduit le Pr Philippe Berthelot, président de la Société française d’hygiène hospitalière (SF2H), à alerter le directeur général de la santé (DGS), Jean-Yves Grall, et le directeur général de l’offre des soins (DGOS), Jean Debeaupuis, le 24 janvier. Dans cette lettre, il demandait qu’une réévaluation du risque d’infection nosocomiale lors de ce type d’examens soit lancée sous l’égide du HCSP. Ce courrier est resté sans réponse, a indiqué aux journalistes le Dr Pierre Parneix, vice-président de la SF2H.

Le Pr David Weber, coauteur du guide de désinfection des dispositifs médicaux du CDC américain, est intervenu pour renforcer l’action de Michèle Rivasi en faveur d’un meilleur niveau de décontamination des sondes. Selon ce pédiatre, il existe actuellement différents moyens, mis en oeuvre Outre-Atlantique, pour assurer une élimination complète des micro-organismes, notamment des procédés chimiques, des traitements par ultra-violets ou encore par gaz-plasma.

Toutefois, certaines sondes ne sont pas adaptées à un traitement chimique. Michèle Rivasi a proposé un amendement au texte sur les dispositifs médicaux qui sera présenté au Parlement européen en septembre. Elle souhaite que chaque fabricant de sondes définisse les procédures de désinfection adaptées à leur produit et que la responsabilité des contaminations soit partagée.

vib/ab/APM polsan

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Par Michèle Rivasi

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